La Fête Est Finie

Je ne vous en ai pas parlé avant, j'attendais d'être sûre. 

Vendredi après-midi, il y a 15 jours, alors que j'allais m'endormir pour une petite sieste bien méritée, après une matinée à désherber, le téléphone a sonné. En général, à cette heure-là c'est pour nous vendre une formation ou des panneaux solaires, mais j'ai décroché.

Mon interlocuteur s'est présenté : Docteur Jekyll médecin conseil de la sécu, je voudrais faire un point sur votre santé. J'étais assommée, car pas du tout préparée pour un interrogatoire et vraiment fatiguée ! Il m'a énuméré mes pathologies, mes traitements, j'ai confirmé, je m'attendais à ce qu'il me fixe un rendez-vous pour me rencontrer, vérifier, poser un contre-diagnostic. Mais non; 20 mn d'entretien puis le verdict est tombé : Je vous mets en invalidité, vous n'aurez pas à retourner au travail. Et il raccroche.

Franchement, j'ai pensé à une mauvaise blague, ou pire, un piège de mon employeur...

Lundi j'ai demandé confirmation par mail et j'ai eu ma réponse mardi. Oui le médecin vous place en catégorie deux vous pouvez faire une demande de pension. 

J'ai envoyé un mail à mon employeur avec un certain nombre de questions pour bien boucler tout ça administrativement. Depuis, aucun retour. Ils ont essayé de me joindre sur mon portable que je ne me suis pas fait greffer au bout de la main et j'estime que mes questions méritent un retour par écrit. Je le leur ai fait savoir, avec copie à "mon" syndicat. Aucune réponse à ce jour.

Vendredi je reçois un courrier recommandé de la sécu me disant que mon état est stabilisé et que je ne toucherai plus d'IJ au premier juillet !

Je ne sais plus par quel bout prendre le problème, mon employeur doit faire un document que je dois envoyer à la prévoyance qui devrait me rémunérer mais en l'absence de bonne volonté ça va être compliqué. Imbroglio administratif et comme toujours aucun interlocuteur valable en face. 

Avec tout ça, j'ai bien replongé. Ce statut d'invalide ça ne me plait pas, j'aurai largement préféré continuer à travailler sur un poste aménagé tant en horaires qu'en équipement. Je ne me sens pas légitime. Et puis dans ce néant social où nous évoluons la perspective d'un strict face à face avec mon mari ne m'emballe pas.

Et puis, ce n'est pas le moment de se paupériser et de jouer son va-tout ! C'est angoissant.

Je ne comprends pas qu'il n'y ait aucun moyen de forcer mon employeur à suivre les prescriptions du médecin du travail, et qu'on fasse payer l'état, ça me fout en colère. 

Qu'est ce que je vais faire de mon temps d'invalide pauvre et paria de la société ? Et ne me parlez pas d'association, de club ou autre distraction pour vieux !  Je n'ai pas envie non plus de travailler bénévolement, c'est une façon de piquer le boulot salarié. Je ne suis socialement plus rien. 

Mon neveu arrive jeudi. ça va m'occuper. Enfin, c'est un ado. Il reste dans sa chambre les 3/4 du temps...

Je ne crois pas que je reverrai mes enfants. 

J'attends. J'envoie des petits messages. On me répond laconiquement, ou pas. 

Voilà. Je vais passer le reste de ma vie à attendre embusquée dans ma jolie maison. Quelques sorties indispensables; le médecin, les courses... 

Le décompte est commencé. 

On tente un début de vie sociale, on rejoint une cellule Solaris. https://solaris-france.org/

Peut être le début de quelque chose. Ou pas.